L’IA pour réhumaniser la relation client-banquier

Dans un contexte où la digitalisation a transformé la relation client-banquier, l’Intelligence Artificielle pourrait bien constituer un levier pour renforcer cette relation. Face à la raréfaction des interactions directes et à la complexité croissante des responsabilités des conseillers, l’IA pourrait offrir une solution pour alléger les tâches administratives et recentrer l’attention sur l’aspect humain. Toutefois, remplacera-t-elle totalement le rôle des conseillers ?

Margaux Vignal, senior manager chez Bartle, partage sa vision, les défis à relever et les perspectives de l’IA dans le secteur bancaire.

Secteur

Services financiers

Auteur

Margaux Vignal

Date de publication

29 août 2023

Temps de lecture

5 mins

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Sommaire de l’article

Pourquoi cette technologie pourrait-elle réhumaniser la relation client-banquier ?

Margaux Vignal : Dans un monde bancaire qui s’est numérisé, les interactions directes avec les conseillers bancaires se raréfient et doivent donc être mémorables. Cependant, les conseillers sont aux prises avec l’augmentation des responsabilités administratives, l’expansion de leur portefeuille de clients et la diversification des produits offerts, face à des attentes croissantes des clients : instantanéité, personnalisation.

Ces contraintes contribuent aux problèmes de recrutement et au turn-over avec des répercussions sur la relation client-banquier. Il n’est pas rare d’entendre autour de moi « Je viens de recevoir un email, mon conseiller a encore changé ! ». Dans ce contexte, l’Intelligence Artificielle pourrait constituer une solution efficace pour déléguer certaines tâches administratives et fournir un support à la vente, ce qui laisserait aux conseillers plus de temps pour se concentrer sur la dimension humaine de la relation avec leurs clients.

L’IA pourrait-elle se substituer aux conseillers bancaires à l’avenir ?

M.V. : Non, je ne pense pas. Certains clients seront toujours réticents à l’idée de converser avec un ChatGPT plutôt qu’avec leur conseiller. Même si ChatGPT a conquis beaucoup d’utilisateurs en peu de temps, l’humain reste un facteur clé de réassurance dans des moments de vie stressants comme une demande de crédit ou la gestion d’une succession. De manière générale, une réassurance humaine est aujourd’hui toujours beaucoup plus efficace sur le taux de conversion qu’une réassurance virtuelle. L’IA générative peut toutefois être un véritable support pour des questions simples et prévisibles.

« Loin de remplacer l’humain, les IA sont une opportunité pour renforcer la complémentarité entre les compétences humaines et les capacités machines » Margaux Vignal, senior manager chez Bartle

Sur quels éléments repose le potentiel de ChatGPT ?

M.V. : Le véritable potentiel de ChatGPT réside dans sa capacité à fluidifier les interactions avec les machines, en employant un langage universel et intuitif. Son accessibilité, sa simplicité d’utilisation et ses réponses instantanées sont probablement les facteurs clés de son adoption rapide par plusieurs millions d’utilisateurs. Il a réussi à casser les barrières du dialogue humain-machine. Jusqu’à présent, les chatbots n’étaient pas de grandes réussites, ChatGPT ouvre de nouvelles perspectives.

Quels sont les défis et les limites associés à l’intégration de l’IA générative dans le secteur bancaire ?

M.V. : Même si les systèmes bancaires intègrent déjà différentes formes d’IA, il reste plusieurs défis à relever : la définition des cas d’usage prioritaires, l’interfaçage agile des initiatives d’IA génératives avec les programmes IT actuels ou encore le recrutement d’experts.

En outre, un ChatGPT présente certaines limites. Sa performance repose sur des probabilités réalisées sur un grand volume de données. Il faudra donc que les banques disposent d’une base de données suffisante et puissent mettre en place des équipes importantes pour « dresser » les algorithmes et s’assurer de la pertinence de la production. Cette transformation prendra surement beaucoup plus de temps qu’annoncé, mais elle révolutionnera profondément le fonctionnement des banques comme ce fut le cas avec la digitalisation.

Quel pourrait être l’avantage concurrentiel à long terme de l’utilisation de l’IA générative ?

M.V. : L’avantage concurrentiel à long terme sera moins dans l’utilisation de la technologie elle-même que dans la capacité à créer des interactions humaines mémorables, augmentées par l’IA. Dans un monde numérique où il est devenu facile de comparer les produits et services, un facteur de différenciation est devenu l’expérience client, et notamment la possibilité d’interagir avec une personne. L’enjeu va être de proposer les bonnes solutions à chaque étape des parcours clients et banquiers.

Comment définir les bonnes solutions à chaque étape de ces parcours ?

M.V. : Pour créer une expérience mémorable, nous conseillons de dresser une cartographie détaillée des étapes du cycle de vie client avec la méthodologie Blueprint en mettant en parallèle les actions du banquier et celles des fonctions supports. Pour chaque étape, il faut définir les canaux et les outils nécessaires, et se poser la question si une IA générative pourrait faciliter le processus. Ces options peuvent ensuite être hiérarchisées en fonction de différents critères : bénéfice pour le client, avantage pour la banque, coût et complexité de mise en œuvre.

L’important est de prendre en compte autant le parcours client que celui du banquier et des fonctions support pour apporter une expérience la plus fluide possible. Les solutions doivent être cohérentes et se répondre entre elles.

Pourriez-vous nous donner un exemple concret de l’application de l’IA dans un parcours client ?

M.V. : Prenons l’exemple de l’ouverture d’un compte. Le client pourrait poser des questions à un chatbot sur les garanties d’une carte, qui enverrait ensuite une notification à un conseiller pour qu’il soit rappelé. Ensuite, lors de l’ouverture de compte, le conseiller serait assisté par une IA générative qui le guiderait dans les questions à poser selon le contexte client et l’aiderait dans la rédaction de sa proposition commerciale.

Quels sont les défis pour mettre en œuvre ces expériences mémorables ?

M.V. : Le principal défi est la conduite du changement nécessaire pour intégrer efficacement ces technologies dans les organisations. Au-delà de la formation à ces nouveaux outils, l’acceptation et l’adaptation des collaborateurs sont des facteurs clés de succès dans ce processus. Il s’agit donc de trouver le juste équilibre entre l’intégration de l’IA dans leurs processus et le maintien d’une relation humaine forte et authentique avec leurs clients.

En conclusion, quel est l’avenir de l’IA dans la relation client-banquier ?

M.V. : L’IA, et en particulier les technologies génératives comme ChatGPT, ouvre des perspectives prometteuses pour transformer la relation client-banquier. Elles sont appelées à devenir un outil essentiel pour aider les conseillers bancaires à gérer leurs tâches et à améliorer l’expérience client, tout en tenant compte des limites et des défis associés à leur déploiement.

Loin de remplacer l’humain, elles sont une opportunité pour renforcer la complémentarité entre les compétences humaines et les capacités machines, pour faire de la relation client-banquier une expérience plus fluide, plus personnalisée et donc plus satisfaisante.

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